Le Conservatoire travaille depuis de nombreuses années avec Téréga, société spécialisée dans les infrastructures de transport et de stockage de gaz, tant dans le cadre de la mise en œuvre de mesures compensatoires que d’un accompagnement pour la gestion différenciée sur des tronçons présentant des enjeux de conservation pour le patrimoine naturel.
Sur l’emprise du gazoduc entre Lussagnet et Captieux (Projet GIRLAND), la prairie de Bascaule, situé sur la commune de Le Frêche (40) dans le Bas-Armagnac, s’inscrit dans un paysage dominé par les cultures de maïs, de vignes alternées par des prairies et des petits boisements ainsi que de quelques étangs. Les travaux de déboisement associés à la création de ce nouveau gazoduc a permis d’augmenter la surface de la prairie humide préexistante et favorable au Cuivré des marais (Lycaena dispar). L’enjeu est d’autant plus important que cette station est isolée de plusieurs kilomètres des stations connues.
Cependant, le site est envahi par le Sainfoin d’Espagne (Galega officinalis), espèce exotique envahissante. Recensée depuis 2014, elle a d’abord été cantonné près du Midou (ruisseau longeant la zone humide au sud), et a colonisé presque l’ensemble de la végétation sur le tracé du gazoduc et s’est développée sur le reste de l’emprise. Le Sainfoin d’Espagne forme des petits fourrés denses limitant le développement d’espèces basses comme certaines plantes nectarifères pour le Cuivré des marais. De plus, la mortalité des graines dans le sol est faible (Oldham, et al., 2009), ce qui permet un rétablissement des populations même après des mesures de gestion ponctuelle.
Des actions d’arrachage avant la montée en graine ont donc été mises en place depuis 2016 avec une association de réinsertion, afin de maintenir son expansion. Pour cela, les pieds sont fauchés manuellement lors de sa floraison (en juin et en septembre) afin d’épuiser les réserves énergétiques contenues dans ses rhizomes. Le reste de la végétation est épargné au maximum afin de favoriser la compétition entre les espèces locales et cette dernière. Les pieds de Rumex et les pontes de Cuivré des marais, présents dans les zones colonisées par le Sainfoin, sont balisés afin que l’équipe intervenante ne les broie pas. Les pieds isolés ont quant à eux été arrachés. En 2020, l’accès à la parcelle n’étant pas carrossable, et la fauche étant réalisée avant la montée en graine, il a été choisi de les déposer pour séchage sur la plateforme en gravier créée par Téréga pour la gestion des berges du Midou.
Suivi du Sainfoin d’Espagne sur la prairie de Bascaule
Les résultats du suivi de l’évolution du recouvrement et des pieds de Sainfoin d’Espagne montrent une progressive diminution de la vigueur des pieds et de leur hauteur moyenne (<80 cm). La surface couverte par l’espèce a quant à elle légèrement augmenté en 2020, du fait de la création d’une piste en 2019 pour des travaux de restauration de la berge du cours d’eau, au remaniement du sol et l’apparition de nouveaux pieds (graines dans le sol). Les graines dans le sol ont une durée de vie moyenne de 10 ans, il est donc important de continuer à épuiser la banque de graines par fauche avant fructification des pieds. Le recouvrement moyen est quant à lui relativement stable depuis 2018 ce qui confirme la limitation de l’expansion de cette plante. La faible reprise de l’espèce en septembre 2020 montre la nécessité de réorienter la gestion par un arrachage manuel et localisé pour les prochaines années.