Un passé industriel qui sert l’avenir de la biodiversité : la carrière des Roques à Lanquais (24)

Niché dans le paysage de Lanquais, petite commune du département de la Dordogne, un site étonnant témoigne d’une reconversion aussi silencieuse que remarquable. La carrière des Roques, après des décennies d’exploitation industrielle, a entamé une nouvelle vie, non pas sous l’action des machines ou de la culture de champignons, mais sous l’aile des chauves-souris. Propriétaire de l’ensemble du site depuis 2021, le Conservatoire d’espaces naturels de Nouvelle-Aquitaine (CEN NA) a engagé une démarche de préservation, transformant ce site en un sanctuaire dédié à la biodiversité.
De la pierre aux chiroptères : la métamorphose d’un site
Abandonnée par l’homme, la carrière n’était pas délaissée pour autant. Ses petites falaises de calcaires, ses galeries profondes et son calme retrouvé ont constitué un habitat de choix pour de nombreuses espèces. Parmi elles, des chauves-souris ont élu domicile dans ces anfractuosités, y trouvant des conditions idéales pour se reposer, se reproduire et surtout hiberner. La quiétude des lieux est en effet cruciale pour leur survie hivernale, une période où le moindre dérangement peut leur être fatal en puisant dans leurs précieuses réserves énergétiques.
Consciente de cette richesse, l’Europe a classé la « Carrière de Lanquais – les Roques » au réseau Natura 2000. Loin d’être une mise sous cloche, ce label est une reconnaissance et un outil pour concilier préservation de la nature et activités humaines. Ici, il ne s’agit pas d’interdire, mais de comprendre et de protéger un écosystème unique à notre porte.
Protéger pour pérenniser : des actions concrètes pilotées par le CEN Nouvelle-Aquitaine
La reconnaissance Natura 2000 a été le catalyseur d’actions de gestion ciblées. Dès son acquisition en 2021, le CEN NA a mis en place un plan de protection ambitieux. La mesure la plus significative a été la signature d’un contrat de fermeture permanente des accès les plus sensibles à la carrière. Cette décision, prise dans le cadre du réseau Natura 2000, a un objectif simple : garantir la tranquillité absolue des chauves-souris durant leur hibernation. Il s’agit d’une barrière physique pour le public, mais une porte ouverte sur la survie pour ces mammifères vulnérables.
Pour renforcer encore ce cadre protecteur, un Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope (APPB) est venu sécuriser juridiquement le site dès 2025. Cet outil réglementaire fort interdit toute action susceptible de porter atteinte à l’habitat des espèces, confirmant l’engagement de long terme du Conservatoire pour la sauvegarde de ce hotspot chiroptérologique.
Expliquer pour accepter : le dialogue avec le public
Une mesure de fermeture, sans explication, peut être perçue comme une privation d’accès ou une simple contrainte. Le Conservatoire l’a bien compris. Afin que ces actions de protection soient comprises, acceptées et même soutenues par la population locale, un panneau d’information a été installé à l’entrée du site.
Cette initiative de médiation est essentielle. Elle raconte l’histoire du lieu, de son passé industriel à sa richesse écologique actuelle. Elle explique la biologie délicate des chauves-souris et justifie pleinement la nécessité de la fermeture. En rendant visible l’invisible, ce panneau transforme un simple grillage en une vitrine sur un monde méconnu. Il fait du passant un témoin informé et, potentiellement, un allié dans la préservation.
Conclusion : un modèle de reconversion écologique
La carrière des Roques à Lanquais est bien plus qu’un ancien site industriel. C’est un symbole fort de la capacité de la nature à reprendre ses droits lorsque l’homme lui en laisse l’espace. C’est aussi un exemple réussi de gestion où le CEN Nouvelle-Aquitaine s’engage activement, main dans la main avec les dispositifs publics (Natura 2000, APPB), pour la protection d’un patrimoine naturel d’intérêt européen. En associant protection stricte et pédagogie, ce projet démontre que l’on peut construire un avenir pour la biodiversité sur les fondations de notre passé industriel, pour le plus grand bénéfice des chauves-souris et de la collectivité toute entière.




