Jeanne a rejoint l’équipe du CEN NA depuis environ trois mois et restera six mois à l’antenne corrézienne dans le cadre de son stage de fin d’étude visant à mettre à jour les connaissances sur la répartition de trois espèces d’Odonates montagnardes dans le cadre de la déclinaison régionale du Plan National d’Action sur les Libellules : Aeshna juncea, Coenagrion hastulatum et Leucorrhinia dubia.

Cette étudiante en Master 2 en “Gestion Conservatoire et Restauration des Écosystèmes” à l’Université de Lorraine, en partenariat avec AgroParisTech, va, durant le printemps et l’été 2022, faire un inventaire et un suivi des populations de ces espèces sur le secteur du Plateau de Millevaches.

Les données issues des inventaires et suivis, combinées à la cartographie de l’occupation des sols de certains sites historiques de prospection, vont nous aider à comprendre l’influence de la structure du paysage sur la répartition de ces espèces au sein du territoire.

 

Choix des sites :

Dans un premier temps les sites ont été sélectionnés en fonction de l’emplacement de données historiques allant de 1982 à 2021 des trois espèces recherchées.

Dans un second temps, les sites propices à la présence d’au moins l’une des trois espèces, se trouvant dans un rayon allant de deux à cinq kilomètres autour des lieux historiques, ont été répertoriés. La longueur du rayon a été choisie en fonction de la distance théorique que les odonates peuvent parcourir lors de leur dispersion ou de leurs déplacements. Selon des études, les zygoptères sont dispersés par le vent lors de leur vol inaugural. Après cette dispersion, ils vont rester au bord des milieux aquatiques ou s’en éloigner que très peu, d’où le choix des deux km de rayon.

Chez les Anisoptères, le phénomène de philopatrie varie d’une espèce à l’autre et, même si, une fois arrivée sur un étang, la plupart des individus y restent durant toute leur vie, certains individus  se reproduisent dans plusieurs étangs différents, plans d’eau séparés de plus d’un kilomètre, d’où le rayon de cinq kilomètres choisi. (Minot, 2020)

Cependant, aucune étude n’a donné de distance de déplacement exacte car elle augmente avec l’effort d’échantillonnage. Elle est donc souvent limitée à l’étendue de la zone d’étude (Schneider 2003; Hassall & Thompson 2012). En prenant en compte cela, les rayons appliqués dans cette étude vont varier de deux à cinq kilomètres selon la taille du site et la présence de milieux favorables (gouille récemment creusée, étang à proximité du site historique) afin de permettre d’obtenir suffisamment de données pour observer la capacité de dispersion des individus dans des réseaux d’étangs ou, s’il n’y en a pas, d’en déduire les barrières.

 

Carte 1 : Sites potentiels et historiques propices à la présence de Aeshna juncea, Coenagrion hastulatum et Leucorrhinia dubia sur le plateau de Millevaches

Méthode d’inventaires et suivis

La campagne de terrain a été planifiée lors de la saison 2022 entre mai et août. Plus de 150 plans d’eau ont été ciblés pour tenter de réaliser un inventaire selon un protocole, créé pour répondre aux besoins de l’étude et de limiter les biais entre les prospections des différents sites et d’obtenir des données représentatives du cortège odonatologique (durée et informations à récolter).

Cartographie de l’occupation du sol

En parallèle, pour comprendre l’influence de la structure du paysage sur la répartition des libellules, des cartes ont été réalisées à l’aide du logiciel QGIS. Elles représentent les différents habitats sur des rayons allant de deux à cinq kilomètres autour de certains sites historiques. Les sites ont été choisis en fonction d’observations récentes de présence des espèces recherchées. Pour le moment, huit sites ont été sélectionnés : l’étang de la Tra La Sagne, la Ferrière, l’étang de Chabannes, l’étang des Oussines, les Ribières de Gladière, le Pont Tord, le lac de Servière et la Tourbière du Chaumadour.

Carte 2 : Occupation des sols de sites propices à la présence de Aeshna juncea, Coenagrion hastulatum et Leucorrhinia dubia sur le plateau de Millevaches

 

Après avoir réalisé ces cartes, le pourcentage d’occupation du sol des différents habitats sera calculé pour obtenir des corrélations entre la présence d’une espèce au sein d’un réseau d’étangs, le taux de boisements et la présence de corridors écologiques entre les différents milieux aquatiques.

Au terme de ses six mois de stage, Jeanne pourra nous éclairer sur la répartition d’Aeshna juncea, Coenagrion hastulatum et Leucorrhinia dubia et de toutes les autres espèces des tourbières et étangs tourbeux du plateau de Millevaches. Cette étude nous aidera à comprendre quels éléments paysagers constituent des freins à leur dispersion et s’il est possible de réaliser des travaux de restauration menant à l’établissement de connectivités entre différents sites.

Le PNA Libellules et sa déclinaison en Nouvelle-Aquitaine est financé par la Région, la DREAL et le FEDER.